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Psychologie cognitive

L’illusion de la volonté : sommes-nous vraiment les auteurs de nos pensées ?

7 Mins de lecture22 octobre 202500 VuesLa rédactionLa rédaction
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Quand l’esprit choisit avant nous

Ima­gi­nez. Vous êtes assis à votre bureau, concen­tré, et sou­dain, une phrase vous tra­verse l’esprit : « J’ai oublié d’envoyer cet e‑mail. » Ce sur­gis­se­ment de pen­sée semble natu­rel, qua­si banal. Mais arrê­tez-vous un ins­tant. Qui, ou quoi, a géné­ré cette pen­sée ? D’où vient-elle réel­le­ment ? L’avez-vous choi­sie ?

Intui­ti­ve­ment, nous nous consi­dé­rons comme les auteurs de notre flux men­tal. En guise de spec­ta­teurs-acteurs de notre théâtre inté­rieur, nous nous féli­ci­tons de cer­taines pen­sées (« Ça, c’est une bonne idée ! »), et nous blâ­mons ou refou­lons d’autres (« Quelle hor­reur d’avoir pen­sé ça… »). Cette posi­tion d’observateur-auteur, ancrée dans la culture occi­den­tale depuis Des­cartes, nous flatte : elle sup­pose une volon­té ration­nelle, éclai­rée et sou­ve­raine.

Pour­tant, depuis les années 1980, des expé­riences déran­geantes ont fis­su­ré cette cer­ti­tude. L’impression que nous contrô­lons nos pen­sées et nos déci­sions pour­rait bien être une fic­tion men­tale, inven­tée a pos­te­rio­ri. Ce que nous res­sen­tons comme la cause consciente d’une action pour­rait n’être qu’un effet, un récit nar­ra­tif gref­fé par le cer­veau pour rendre cohé­rente une action qui, en réa­li­té, a déjà été ini­tiée ailleurs, autre­ment.

Face à cette idée – nous ne déci­dons pas consciem­ment ce que nous pen­sons, res­sen­tons ou même fai­sons – une éton­nante résis­tance s’élève. Car remettre en ques­tion cette illu­sion, c’est perdre une forme de confort exis­ten­tiel. C’est s’avouer, en par­tie, marion­nette de ses propres auto­ma­tismes.

Ain­si com­mence une explo­ra­tion dérou­tante : et s’il n’y avait per­sonne aux com­mandes ?


L’expérience Libet : une fêlure dans la volonté

C’est en 1983 que Ben­ja­min Libet, neu­ro­phy­sio­lo­giste amé­ri­ca­no-tchèque, élec­tri­fie la com­mu­nau­té scien­ti­fique. Son expé­rience célèbre consiste à deman­der à des par­ti­ci­pants de bou­ger un doigt « quand ils le décident », tout en enre­gis­trant l’activité élec­trique de leur cer­veau.

Résul­tat ? Le « poten­tiel de pré­pa­ra­tion » – une onde céré­brale annon­çant l’action – appa­raît jusqu’à 350 mil­li­se­condes avant que le par­ti­ci­pant n’ait conscience de sa déci­sion de bou­ger. La conscience agit donc après le cer­veau.

L’expérience a fait cou­ler des océans d’encre. Cer­tains y voient la preuve que le libre arbitre est une illu­sion, d’autres défendent une forme de « veto conscient » : nous ne choi­sis­sons pas d’agir, mais nous pou­vons empê­cher l’action. Cepen­dant, l’implication majeure reste sou­vent évi­tée : entre le moment où le corps se pré­pare à agir et celui où nous en pre­nons conscience, un gouffre de fonc­tion­ne­ment auto­ma­tique s’ouvre.

Pas besoin de mou­ve­ments mus­cu­laires : dans des expé­riences récentes repro­dui­sant le pro­to­cole de Libet, on observe des poten­tiels simi­laires pour des déci­sions men­tales abs­traites – choi­sir un mot, faire un cal­cul, répondre par oui ou non.

La pen­sée elle-même n’est peut-être qu’un effet secon­daire d’un méca­nisme qui a déjà ini­tié le pro­ces­sus.

La pro­chaine fois qu’une idée « vous vient », deman­dez-vous vrai­ment : l’ai-je pen­sée, ou l’ai-je reçue ? D’où me vient-elle, dans l’espace du men­tal ?


L’invention du sentiment d’auteur : quand l’esprit fabrique le moi

Dans les années 2000, le cher­cheur Daniel Wegner popu­la­rise une idée fon­da­men­tale : la « théo­rie du sen­ti­ment d’auteur » (theo­ry of appa­rent men­tal cau­sa­tion). Selon lui, notre cer­veau fabrique une illu­sion d’intentionnalité, notam­ment lorsqu’il anti­cipe cor­rec­te­ment le résul­tat d’une action.

Un exemple ? Si je tends la main pour attra­per une tasse, et que je sens le contact sous mes doigts, j’ai l’impression d’avoir vou­lu ce geste. Or, cette sen­sa­tion vient de la pré­dic­tion offi­cielle du cer­veau : il avait ‘pré­vu’ que cela devait se pro­duire. Si le résul­tat concorde avec la pré­dic­tion, le cer­veau déduit que j’en suis l’agent.

Mais quand il y a un déca­lage entre inten­tion et résul­tat, ce sen­ti­ment d’auteur peut dis­pa­raître… ou se réat­tri­buer ! Dans l’illusion bien connue de l’« auto­ma­tisme idéo­mo­teur » – comme la planche Oui­ja –, des par­ti­ci­pants croient que le cur­seur bouge tout seul. En réa­li­té, ce sont eux qui le déplacent incons­ciem­ment. Tout repose sur la non-per­cep­tion de leurs propres micro-actions et une attri­bu­tion erro­née : « Ce n’est pas moi. »

Le sen­ti­ment d’être l’auteur d’une action ou d’une pen­sée dépend bien plus de la cohé­rence nar­ra­tive post hoc que d’un contrôle réel et cen­tral. Nous sommes les scé­na­ristes d’un film déjà en train de se jouer.

Exer­cice d’observation cog­ni­tive : Notez, durant une jour­née, com­bien de pen­sées vous viennent sans effort. Quelles pen­sées reven­di­quez-vous ? Les­quelles reje­tez-vous ? Qui parle vrai­ment ?


L’auto-narration comme faux gouvernail

Chaque jour, nous construi­sons le récit de nous-mêmes. Nous nous racon­tons : nos rai­sons, nos choix, nos inten­tions. Mais ces « rai­sons » sont sou­vent recons­truites a pos­te­rio­ri. Dans une célèbre expé­rience conduite par Nis­bett et Wil­son (1977), les par­ti­ci­pants doivent choi­sir entre plu­sieurs bas de nylon (iden­tiques). Tous ou presque choi­sissent ceux de droite, et quand on leur demande pour­quoi, ils donnent des jus­ti­fi­ca­tions liées à la tex­ture ou à la cou­leur. Aucun ne men­tionne que leur choix a été biai­sé par la posi­tion spa­tiale.

Le cer­veau excelle dans l’art de ratio­na­li­ser après coup.

Ce méca­nisme n’est pas men­son­ger : il est incons­cient. Notre esprit nar­ra­tif construit une his­toire plau­sible pour expli­quer une action déjà déci­dée ailleurs, dans les couches pro­fondes, impli­cites, heu­ris­tiques de l’encéphale.

Dans cette pers­pec­tive, la volon­té n’est pas la force d’un capi­taine éclai­ré, mais le sillage lais­sé par un navire auto­ma­tique, que l’on regarde après coup en se disant : « C’est moi qui ai diri­gé. »

Et si la volon­té n’é­tait qu’un effet secon­daire de la mémoire ? Autre­ment dit, une recons­truc­tion de pour­quoi on a fait ce qu’on a déjà fait.


Intelligence artificielle, fourmis et poésie neuronale

À l’ère des intel­li­gences arti­fi­cielles géné­ra­tives, une ana­lo­gie fas­ci­nante émerge : et si notre pen­sée res­sem­blait aux archi­tec­tures dis­tri­buées, sans chef d’orchestre ? Comme les IA qui pro­duisent des textes sans com­prendre, notre propre dis­cours men­tal pour­rait n’être rien de plus qu’un out­put sta­tis­tique de micro-agents internes.

La com­pa­rai­son avec les colo­nies de four­mis éclaire cette idée. Les four­mis, indi­vi­duel­le­ment très limi­tées, pro­duisent col­lec­ti­ve­ment des archi­tec­tures com­plexes, sans hié­rar­chie cen­trale. Pas besoin de chef : des signaux locaux suf­fisent.

Le phi­lo­sophe Daniel Den­nett a déjà sug­gé­ré que notre conscience fonc­tionne pareil : émer­gente, dis­tri­buée, sans siège fixe. C’est une poé­sie neu­ro­nale, pas une salle de contrôle.

Alors, si l’esprit est une fédé­ra­tion de ten­dances, d’associations, de pré­dic­tions, peut-on encore croire que le “je” règne ? Ou serait-il une fic­tion utile, comme une éti­quette col­lée sur une bou­teille vide pour lui don­ner un sens ?

Micro-expé­rience men­tale : Ima­gi­nez que toutes vos pen­sées soient géné­rées par des modules indé­pen­dants, que vous ne contrô­lez pas. Quel mot pour­riez-vous uti­li­ser pour décrire « vous-mêmes » ? Existe-t-il encore un “je” ?


Un roi nu dans un palais sans trône

L’illusion de la volon­té n’a rien d’anecdotique. Elle est peut-être la plus grande super­che­rie évo­lu­tive, une fonc­tion de cohé­sion sociale plus qu’un reflet de réa­li­té. Croire que nous déci­dons nous-mêmes de nos pen­sées, c’est don­ner corps à un mythe struc­tu­rant.

Mais ce mythe est utile — au moins, il l’a été. Il pro­tège notre res­pon­sa­bi­li­té sociale, jus­ti­fie nos actes, ren­force nos pré­fé­rences, forge le lien entre l’acte et la per­sonne. Pour­tant, lorsqu’on ose le regar­der en face, il s’effrite.

Cela ne signi­fie pas que tout est per­du. Un monde sans volon­té cen­trale n’est pas un monde de chaos. C’est un monde d’émergences, d’ajustements, de ten­sions intra­cog­ni­tives. Un monde où l’on apprend à obser­ver les flux qui passent en nous sans les confondre avec des déci­sions.

Le phi­lo­sophe Boud­dha disait : “Ce n’est pas moi qui pense – la pen­sée me pense.” Il ne par­lait pas d’humilité. Il décri­vait une luci­di­té.

Alors, à par­tir d’où pour­rions-nous vivre, si ce n’est à par­tir du « je » ?
Et que se pas­se­rait-il si nous lais­sions les pen­sées venir, sans les croire, ni les com­battre, ni les signer de notre nom ?

Ouvrez la fenêtre. Il n’y a peut-être per­sonne à l’intérieur – et, étran­ge­ment, cela apaise.


  • Ne cher­chez pas à savoir ce que vous pen­sez. Obser­vez plu­tôt ce que pense l’esprit – et déci­dez, len­te­ment, si cela vous appar­tient.

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  • Quelle expé­rience per­son­nelle ce sujet vous évoque-t-il ? Avez-vous déjà dou­té d’être l’auteur d’une de vos pen­sées ?

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